Accord sur les ressources ukrainiennes : l’Ukraine face à un marché de dupes avec les États-Unis ?

Wait 5 sec.

Kiev et Washington poursuivent leurs négociations sur un accord portant sur l’exploitation des ressources minérales ukrainiennes, selon le Financial Times. Présenté par les responsables ukrainiens comme une opportunité stratégique, cet engagement pourrait pourtant s’avérer bien plus contraignant qu’il n’y paraît, mettant en jeu l’avenir économique et souverain du pays.D’après le quotidien britannique, l’Ukraine se dit prête à signer un accord pour l'exploitation conjointe de ses ressources naturelles, notamment le pétrole et le gaz. Un revirement qui intervient après que les États-Unis auraient abandonné leur exigence initiale d’un droit sur 500 milliards de dollars de revenus futurs, une demande qui avait suscité une forte indignation à Kiev et en Europe.Si ce changement a été accueilli comme une victoire par les négociateurs ukrainiens, le texte final demeure flou sur de nombreux points cruciaux, notamment la réelle marge de manœuvre de l’Ukraine dans l’exploitation de ses propres ressources. Olga Stefanichyna, vice-Première ministre ukrainienne et ministre de la Justice qui a dirigé les négociations, a avoué que les autorités ukrainiennes ne savaient pas exactement à quoi ressemblerait cet accord avec les États-Unis: «L’accord sur les minerais n’est qu’une partie du tableau. L’administration américaine nous a dit à plusieurs reprises qu'il faisait partie d’un ensemble plus vaste».Une visite de Zelensky pour officialiser un engagement risquéLe FT, citant un haut responsable ukrainien, a indiqué que Volodymyr Zelensky prévoirait de se rendre à Washington pour rencontrer le président américain Donald Trump et finaliser l’accord.Le mardi 25 février, Trump a laissé entendre que cette visite était envisageable : «J’ai entendu dire qu’il venait vendredi [28 février]. C’est certainement OK pour moi. Il aimerait le signer avec moi, et je comprends ça – c’est une grande affaire, une très grande affaire».Un fonds d’investissement sous contrôle américainToujours selon le quotidien britannique, le texte actuel, daté du 24 février, prévoit la création d’un fonds où l’Ukraine devra verser 50 % des revenus issus de la monétisation future de ses ressources minières, y compris le pétrole et le gaz. Officiellement, ce fonds devra servir à financer des projets en Ukraine, mais les modalités exactes de sa gestion restent floues.Cet accord ne concernerait que les nouvelles exploitations et exclura les ressources déjà exploitées par les entreprises publiques ukrainiennes Naftogaz et Ukrnafta.Le FT note que l’accord ne mentionne aucune garantie sécuritaire américaine, un point pourtant présenté par Kiev comme une priorité. De plus, des éléments clés comme la participation financière exacte des États-Unis et les modalités de la propriété conjointe restent à négocier.Des critiques acerbes sur la scène internationaleCette situation n’a pas manqué de susciter des vives réactions sur la scène internationale. Tandis que certains observent avec perplexité la manière dont Kiev négocie son avenir, d’autres dénoncent ouvertement ce qu’ils considèrent comme une erreur stratégique majeure. Parmi eux, le président colombien Gustavo Petro, qui n’a pas mâché ses mots sur X : «La stupidité de Zelensky, je le dis sans ambages, est qu’il s’est laissé manipuler par les Européens de l’Ouest qui ne savent pas où ils vont, en direction d’Hitler ou nulle part ; ils se battent contre leurs frères slaves, et finalement il finit par offrir l’Ukraine aux Américains. Quelle stupidité !».Un accord dicté par WashingtonAlors que les États-Unis étaient, ces trois dernières années, le principal soutien militaire de l’Ukraine, Donald Trump a amorcé un tournant stratégique en engageant des discussions directes avec Moscou, excluant Kiev et ses alliés européens.La première mouture du projet a soulevé une vive opposition à Kiev. Le président des États-Unis voulait imposer à l’Ukraine une obligation de remboursement massif en contrepartie de l’aide militaire et financière reçue depuis 2022, une approche perçue comme un véritable marché de dupes.Face au refus de Zelensky, Trump n’a pas hésité à le qualifier de «dictateur», déclarant que Kiev portait la responsabilité du conflit en Ukraine. Une humiliation diplomatique qui n’a pourtant pas empêché les Ukrainiens de revenir à la table des négociations avec les Américains.L’accord éventuel devra être soumis au Parlement ukrainien, où l’opposition a déjà annoncé qu’elle mènerait une bataille acharnée avant toute ratification. Certains députés dénoncent une décision précipitée à cause de laquelle, les ressources nationales pourraient à terme être bradées sans véritable bénéfice pour l’Ukraine.