Le premier traitement contre le paludisme pour les bébés est une étape majeure vers l'éradication de la maladie en Afrique

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Le premier traitement contre le paludisme destiné aux bébés et aux jeunes enfants âgés de 2 mois à 5 ans a été approuvé début juillet 2025 par Swissmedic, l’agence suisse des produits thérapeutiques. Jusqu'à présent, les bébés et les très jeunes enfants étaient traités avec des médicaments conçus pour les enfants plus âgés. The Conversation Africa a interrogé Fortunate Mokoena sur l'importance de cette autorisation et son impact sur la lutte contre le paludisme en Afrique. Elle est biochimiste et se consacre à la recherche de nouveaux traitements pour des maladies qui frappent particulièrement les enfants de moins de cinq ans, comme le paludisme et la pneumonie.Quelle est l'importance de cette autorisation pour le traitement du paludisme en Afrique ?Cette autorisation est extrêmement importante.L'OMS s'est fixé un objectif ambitieux et visionnaire : éradiquer le paludisme d'ici 2030. Il s'agit d'un défi qui exige des mesures audacieuses et multidimensionnelles : des insecticides et des moustiquaires aux vaccins, en passant par la lutte contre les vecteurs et les traitements efficaces.Ce nouveau médicament est une étape importante dans la lutte contre le paludisme. Il apporte de l’espoir et des progrès tangibles en proposant un traitement vital, spécialement conçu pour les plus jeunes et les plus vulnérables, notamment les enfants de moins d’un an et pesant seulement 4,5 kg. Chaque progrès comme celui-ci permet non seulement de sauver des vies, mais aussi de renforcer la détermination collective à créer une Afrique sans paludisme. Il s’agit de donner à chaque enfant la chance de grandir, s'épanouir et rêver libéré du poids de cette maladie.L'avenir du traitement du paludisme en Afrique est plus prometteur que jamais. Cette autorisation permet non seulement de sauver des vies et d'assurer un avenir meilleur aux enfants africains, mais elle met davantage en évidence également l'énorme potentiel du continent. L'éradication du paludisme pourrait sauver d'innombrables vies et débloquer environ 126 milliards de dollars du PIB de l'Afrique. ce qui pourrait avoir un impact considérable sur la santé et la prospérité.Même si la recherche dans le secteur pharmaceutique est encore à ses débuts, elle est déjà très prometteuse. Des pionniers tels que le Professeur Kelly Chibale, dont le médicament antipaludique révolutionnaire a atteint la phase II des essais cliniques, ont démontré ce qu'il était possible de d'accomplir. Grâce à la Fondation H3D, Chibale a réuni quelques-uns des meilleurs talents scientifiques africains afin de se concentrer sur des maladies telles que le paludisme et la tuberculose, stimulant ainsi l'innovation et l'espoir.Cette autorisation peut servir de catalyseur puissant, en inspirant et en donnant les moyens aux scientifiques africains pour leur permettre de continuer à développer des médicaments qui sauvent des vies. Avec plus d’expertise et de détermination, l’Afrique pourra non seulement traiter le paludisme, mais aussi l’éradiquer. Et peut-être même ouvrir la voie à un avenir plus sain et plus prospère pour tous.Quelle est l'ampleur du paludisme chez les enfants en Afrique ?Le paludisme reste l'un des problèmes de santé les plus urgents en Afrique. En 2023, on estimait à 263 millions le nombre de cas de paludisme et à 597 000 le nombre de décès dûs à cette maladie dans 83 pays, la majorité des victimes étant des jeunes enfants et des femmes enceintes. En 2023, la région africaine de l'OMS comptait 94 % des cas de paludisme (246 millions) et 95 % (569 000) des décès dus au paludisme. Les enfants de moins de 5 ans représentaient environ 76 % de tous les décès dûs au paludisme dans la région.Le fardeau est particulièrement lourd en Afrique subsaharienne, notamment dans les zones rurales où la pauvreté et l'accès limité aux soins de santé aggravent la situation. Mais c'est aussi un appel puissant à l'action. En luttant contre le paludisme, les Africains ont la possibilité non seulement de sauver des vies, mais aussi de libérer l'immense potentiel des enfants. Ils peuvent également renforcer les communautés et bâtir un avenir plus sain, plus prospère et plus durable pour l'Afrique.Comment soignait-on les bébés contre le paludisme jusqu'à présent ?Jusqu’à maintenant, il n’existait pas de traitement antipaludique efficace spécialement conçu pour les nouveau-nés. Cela a créé un grand vide dans la prise en charge des enfants les plus jeunes et les plus vulnérables. Il est déchirant de constater que ces petits êtres précieux reçoivent souvent des médicaments conçus pour des enfants plus âgés. Cela peut entraîner des effets secondaires désagréables et des réactions toxiques. Il est important de comprendre que le corps des bébés fonctionne différemment de celui des enfants plus grands ou des adultes. Leurs besoins physiologiques sont spécifiques et nécessitent une prise en charge adaptée.Par exemple, les nouveau-nés sont encore en phase de développement de leur fonction hépatique, ce qui a un impact sur la façon dont ils transforment les médicaments par rapport aux enfants plus âgés. D'où l'urgence de mettre en place des stratégies de traitement personnalisées pour combattre le paludisme néonatal.Quels sont les obstacles susceptibles d'entraver le déploiement ?Swiss Medic collabore avec huit pays africains afin d'améliorer le déploiement du médicament dans le cadre d'une initiative mondiale en matière de santé. Novartis a développé ce médicament avec le soutien de Medicines for Malaria Venture. Il a été cofinancé par le Partenariat des pays européens et en développement pour les essais cliniques et l’Agence suédoise de coopération internationale au développement. Novartis va lancer Coartem Baby, un traitement antipaludique à but non lucratif destiné aux nourrissons. Ce traitement répond à un besoin urgent : chaque année, 30 millions d'enfants naissent dans des zones à risque de paludisme en Afrique.Le Ghana a déjà commencé à le déployer. Huit autres pays devraient l’approuver très prochainement : le Burkina Faso, la Côte d’Ivoire, le Kenya, le Malawi, le Mozambique, le Nigeria, la Tanzanie et l’Ouganda.Pour réussir ce déploiement, il est indispensable d’obtenir des financements supplémentaires. Il sera aussi crucial de s’appuyer sur l’expertise locale pour améliorer l’efficacité du projet sur le terrain.Dans certaines régions, les formulations du médicament peuvent nécessiter une lyophilisation pour faire face à des conditions telles que les coupures d'électricité. La lyophilisation, également connue sous le nom de séchage par congélation, est une forme de conservation des produits qui élimine toute l'humidité et l'eau du produit.Il est essentiel d'investir dans les infrastructures de fabrication locales afin de réduire les coûts de production. C’est à la fois un appel à l’action et un rappel que la lutte contre le paludisme est loin d’être terminée.Fortunate Mokoena bénéficie d'un financement de la Science for Africa Foundation (SFA) dans le cadre de la deuxième cohorte de boursiers Grand Challenges Africa de la Fondation Bill et Melinda Gates (GCA/Round10/DD-065 à F.M.). Le financement de l'agence sud-africaine pour l'innovation technologique est également très apprécié. Fortunate Mokoena est membre à part entière du Grand Challenges Drug Discovery Accelerator.