Tanzania: ONU Femmes : transformer les données sur le genre en impact réel

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Countries: United Republic of Tanzania, Georgia, Kenya, Tonga Source: UN Women Découvrez la façon dont les investissements ciblés permettant la collecte de données peuvent conduire à des actions transformatrices en faveur de l’égalité des sexes et des droits des femmes.« Nous partageons les données parce qu’elles sont très importantes », explique Juma Haji Juma, présentateur radio, travaillant pour la radio Tumbatu FM de Zanzibar. Cette station de radio communautaire diffuse depuis 2024 un segment mensuel consacré aux violences basées sur le genre et elle communique des statistiques sur les cas signalés dans la région. « Lorsque les informations sont étayées par des données, elles ont plus de poids et elles incitent à trouver de bonnes solutions ensemble. »Il est indispensable de comprendre toute l'étendue d'un problème pour concevoir des solutions efficaces. Les inégalités entre les sexes n’échappent pas à la règle. Toute la difficulté réside dans le fait que malgré leur demande initiale de données factuelles, les décideurs investissent dans ce domaine en dernier lieu.ONU Femmes et ses partenaires ont investi plus de 80 millions de dollars US dans le Programme Women Count (« Les femmes comptent ») depuis 2016, et ont ainsi adopté une approche radicalement différente, démontrant combien la collecte, l’utilisation et le partage de données sur le genre permettent d’engager des actions mieux ciblées, aboutissant à des effets plus transformateurs.Les efforts appuyés par ONU Femmes concernant l’obtention de données ventilées par sexe ont suscité un certain intérêt et permis de répondre à la demande, conduisant ainsi à une production et à une utilisation accrues de ces données ; ils ont également contribué à renforcer durablement les capacités dans ce domaine. Tout ce travail a débouché sur des initiatives importantes, visant par exemple, à combler des lacunes institutionnelles ou à élaborer des politiques, des lois et des programmes dans des domaines urgents tels que l’autonomisation économique des femmes, la lutte contre la violence à l’égard des femmes et des filles, l’action humanitaire et l’environnement. En fait, dans tous ces domaines, les données liées au genre font défaut, et ce depuis longtemps ; or l’existence de données actualisées, précises et ventilées peuvent littéralement permettre de sauver des vies.Un Recueil de cas d’utilisation de données relatives au genre vient d’être publié par ONU Femmes, qui documente la façon dont le programme Women Count catalyse le changement :Vies sauvées grâce à une aide humanitaire plus cibléeAccès accru aux opportunités économiquesRenforcement de la protection socialePrévention de la violence basée sur le genreMeilleure coordination des plans d’intervention face aux changements climatiques ou aux catastrophesVoici quelques exemples témoignant des efforts engagés par ONU Femmes pour promouvoir l’obtention de données plus nombreuses et de meilleure qualité sur le genre.Les données pour mettre fin à la violence : République-Unie de Tanzanie« Avant, je ne savais pas à qui m’adresser pour signaler les cas de violence. Mais maintenant, j’ai toutes les informations et la confiance nécessaires pour aider d’autres membres de ma communauté à faire de même », explique Fatma Haji Silima, auditrice habituelle de la radio Tumbatu FM.Lorsque cette station de radio communautaire basée dans le district de Kaskazini à Zanzibar, en Tanzanie, a commencé à diffuser des statistiques locales sur la violence à l’égard des femmes et des filles, publiées chaque mois par ONU Femmes et le Bureau des statistiques du gouvernement de Zanzibar, son objectif était surtout de faire reculer les normes culturelles qui empêchent les femmes de s’exprimer ouvertement sur les abus dont elles font l’objet de la part des hommes au sein de leur communauté.« Nous ne nous contentons pas de diffuser des statistiques ; nous essayons de remettre en question les idées reçues, de faire connaître les services existant et d’encourager l’action », explique Amina Mohamed, animatrice à la radio Kati de Zanzibar, qui est dirigée par des jeunes et a également commencé à diffuser ces données, à interviewer des expert·e·s et à répondre aux appels des auditeur·rice·s. « Cela contribue à démystifier la violence basée sur le genre et à combattre la crainte de s’exprimer sur le sujet. »Les radios Tumbatu FM et Kati, ainsi que d’autres stations, sont maintenant des plates-formes de sensibilisation et de dialogue. La police de Zanzibar affirme même qu’elles ont contribué au signalement de 1 809 cas en 2024, soit une augmentation de 28 % par rapport à 2020, avant la diffusion mensuelle des données.Ces données contribuent également à orienter les interventions menées dans le cadre du Plan d’action national de la Tanzanie pour mettre fin à la violence à l’égard des femmes et des enfants. Elles sont utilisées par les responsables politiques, les prestataires de services et les autorités locales pour mettre en œuvre des actions ciblées : formation spécialisée des forces de police, ouverture de bureaux spécialisés dans les questions de genre et recevant les signalements en toute confidentialité, ouverture de centres d’accueils où les victimes et les survivantes peuvent bénéficier d’un soutien thérapeutique, de services de santé et d’une assistance juridique.Les données pour des interventions efficaces en cas de catastrophe : KenyaIsabella Nzioki se souvient avoir été réveillée en sursaut par les cris de ses voisins, le 23 avril 2024, lorsque les rives du fleuve Mathare, à Nairobi ont débordé, ensevelissant un grand nombre de maisons et d’habitants.Elle n’a pas hésité à offrir son aide et à mettre à profit ses nouvelles compétences, acquises lors d’une discussion-formation organisée par ONU Femmes et GROOTS-Kenya un mois plus tôt, concernant le recueil de données ventilées.Agente de santé communautaire expérimentée, elle a rapidement commencé à recenser les 81 personnes survivantes, dont 64 femmes. La Croix-Rouge kényane estime que ces données ont permis d’identifier les personnes les plus vulnérables juste après la catastrophe, notamment des femmes enceintes et allaitantes. Elles ont également permis d’améliorer la distribution de l’aide alimentaire, les interventions des cliniques mobiles, l'accès aux médicaments, au traitement de l'eau et aux articles d’hygiène, ainsi que l’aide financière gouvernementale.« J’ai été si surprise, car [ces] données ventilées ont permis aux agences humanitaires d’entrer en contact avec les victimes », explique Isabella Nzioki. « [Elles] ont permis d’établir un lien rapide et indispensable avec l’aide proposée. »Les données pour une parentalité plus égalitaire : GéorgieAprès avoir suivi une formation sur l’égalité hommes-femmes proposée par son employeur début 2023, Avtandil Tsereteli, âgé de 34 ans, a choisi de prendre un congé de paternité à la naissance de son fils, Alexandre. Ainsi, sa femme a pu continuer à travailler.« C’est l’une des décisions les plus importantes que j’ai prises dans ma vie », affirme-t-il.Peu après la publication de l’enquête nationale sur l’utilisation du temps par ONU Femmes, son employeur, la banque géorgienne TBC Bank, a mis en place cette formation obligatoire. Entre 2021 et 2022, aucun employé de sexe masculin n’a pris de congé de paternité. La banque a alors commencé à communiquer les résultats de l’enquête dans le cadre de formations et à encourager activement ses employés à prendre leur congé parental entièrement payé, d’une durée pouvant aller jusqu’à six mois. Ainsi, Avtandil Tsereteli et d’autres nouveaux pères ont pris conscience de l’importance de cet avantage et ont décidé d’en bénéficier.Au sein du Bureau de la fonction publique de ce pays, une réforme législative a également été adoptée, avec l’appui d’ONU Femmes, pour offrir un congé de paternité non transférable aux employés du secteur public.Comparativement aux hommes qui travaillent en Géorgie, les femmes employées à plein temps consacrent :5 fois plus de temps aux tâches domestiques non rémunérées3 fois plus de temps aux soins non rémunérésLire la suite de l'enquête 2020-2021 sur l'utilisation du temps en Géorgie.Les données au service de l'adaptation au climat : TongaEn 2022, une enquête historique sur le genre et l'environnement (GES) a été menée dans le royaume des Tonga. Elle a révélé que 93 % des personnes interrogées avaient été confrontées à au moins trois catastrophes au cours des 12 derniers mois, et que les femmes étaient plus susceptibles que les hommes d'être impactées par :des problèmes de santé mentale (92 % contre 85 %)une perte de revenu (63 % contre 60 %)une diminution de leur consommation alimentaire (14 % contre 11 %)ONU Femmes a soutenu le Département des statistiques des Tonga tout au long de l’enquête, dont les conclusions ont contribué à la révision du Plan sectoriel agricole, du budget 2024 par le Ministère des Finances, et de la politique nationale d’autonomisation des femmes et d’égalité entre les sexes.« Nous voyons ce qui peut se produire en situation d’urgence et quels sont les besoins, ce qui nous permet de mieux nous coordonner », explique Anna Jane Lagi, de la Division des affaires féminines et de l’égalité des sexes des Tonga. Elle collabore désormais avec le Bureau national de gestion des risques de catastrophe pour organiser des formations conjointes sur l’approche genre pendant les interventions humanitaires, à l’intention des prestataires de services et des premiers secours.En novembre 2023, lorsque le Ministre des Finances a partagé les conclusions de l'enquête sur le genre et l'environnement lors de la COP28, la Conférence internationale sur le changement climatique, son intervention a été un exemple très illustratif d’action environnementale sensible au genre et une preuve éclatante de l’engagement de ce pays en faveur de la résilience climatique.Ce sont là quelques-uns des nombreux résultats du programme « Women Count », actuellement financé par les gouvernements australien, français, irlandais, italien et suédois et par la Fondation Gates. Depuis 2016, ce programme a radicalement modifié la manière dont les statistiques ventilées par sexe sont devenues une priorité, car leur production et leur exploitation permettent de transformer la vie des femmes et des filles. La troisième phase de mise en œuvre du programme devrait démarrer en 2026.