L’action judiciaire, engagée séparément mais de concert devant le tribunal de commerce de Paris, menée par Radio France et France Télévisions marque un nouveau chapitre dans le conflit opposant l’audiovisuel public aux médias du groupe Bolloré.Les deux groupes publics, dirigés par Sibyle Veil et Delphine Ernotte, reprochent à CNews, Europe 1 et le « JDD » de dénoncer des attaques systématiques, initiées par la diffusion en septembre d’une vidéo compromettante impliquant deux journalistes du service public en conversation avec des responsables socialistes. Escalade des tensions après l’affaire Legrand-Cohen L’affaire Legrand-Cohen, révélée par le média en ligne L’Incorrect, a servi de catalyseur.Les chaînes et le journal du groupe Bolloré ont largement relayé ces accusations de partialité politique, dépeignant les médias d'État comme biaisés en faveur de la gauche.En réponse, Radio France et France Télévisions avaient déjà saisi l’Arcom mi-septembre, dénonçant une « campagne de dénigrement systématique et quotidienne ». Delphine Ernotte avait alors accusé la « galaxie Bolloré » de viser la privatisation du service public, déclarant : « Il faut admettre que CNews est un média d’opinion. Qu’ils assument d’être une chaîne d’extrême droite ! ».Une étude de La Revue des médias souligne l’ampleur de la couverture : entre le 5 et le 19 septembre, CNews a consacré jusqu’à 95,6 % de son temps d’antenne à l’affaire Legrand/Cohen avec une moyenne de 287 mentions par jour.Serge Nedjar, patron de CNews, avait riposté en fustigeant un « manque de mesure » de la part d’Ernotte.L’Arcom, après audition des dirigeantes des médias publics français, a annoncé approfondir ses enquêtes sur l’impartialité du service public. Delphine Ernotte, déjà mise en difficulté en octobre après un rapport dénonçant un climat de travail « brutal » et une organisation « autoritaire et élitiste », joue gros en assignant les médias du groupe Bolloré. En cas de désaveux, sa gouvernance controversée pourrait être un peu plus mise en cause. Ni les plaignants ni le groupe Canal+ n’ont commenté la procédure, qui pourrait redessiner les rapports de force dans l’audiovisuel français.